Une nuit réparatrice plus tard, la tête encore un peu remplie des mélodies de Notwist, c’est le moment de préparer les affaires pour affronter le fort de Saint-Père. Parce qu’évidemment la pluie, notre vieille amie de la mi-août, est au rendez vous, ça fera au moins un occasion d’éprouver les fameux travaux de drainage de l’enceinte vénérable dont on a entendu parler depuis quelques temps (un peu, genre là, et dans d’autres endroits moins recommandables).
On arrive sur le parking sous une pluie un peu battante, l’endroit est évidemment devenu un champ de boue (c’était avant le paillage magique), on se gare puis vient le moment de prendre contact avec la réalité de l’extérieur.
Il y a un petit parcours obligé, entre retirer les différents bracelets et notre précieuse carte cashless (une autre des innovations du festival). Une petite séance de montage de tente sous une tempête biblique plus tard (on a payé 5 euros, le confort sera au rendez vous), on peut enfin se rapprocher du fort. Ce qui est bien cette année, c’est que l’ancien chemin d’accès au fort est de nouveau d’actualité, pas de boue jusqu’aux yeux, mais plutôt une occasion de déambuler le nez en l’air en regardant la belle collection de photos de Richard Bellia. La promenade ça ne sera pas pour aujourd’hui en fait, mais on y pensera demain. Car il y a un rendez vous avec une moitié de Girl Band pour un petit entretien (que vous pourrez lire sous peu).
Après l’interview, la pluie cesse (miracle), j’ai le temps d’aller jeter un œil à l’énergie très communicative des Wand au sec. Les Wand sur scène, ce sont des gros riffs, des envolées psychédéliques et une foule de clin d’œil aux grands anciens. Mais aussi à un musicien bien actuel et à ses projets (d’ailleurs présent incognito sur le côté de la scène), Ty Segall couve en effet du regard ses protégés.
Le temps de se rendre compte de leur son bien abrasif sur scène, et l’heure d’aller à la rencontre des Algiers, qui jouent plus tard dans la soirée.
Un entretien plutôt intéressant, où on aura appris qu’être assistant à Bain-de-Bretagne peut conduire à tout, et qu’un groupe de rock peut parler de politique sans être grotesque et sans sombrer dans les clichés (on en reparlera).
Le marathon des concerts se poursuit, avec notre (très) vieil ami Thurston Moore et son nouveau groupe.
Le divorcé le plus connu du rock à l’air très en forme, il déroule tranquillement les compositions de son dernier album en date The Best Day. Sur scène il est accompagné de Debbie Googe la bassiste de My Bloody Valentine et d’un guitariste qui semble être son clone.
On retrouve la plupart des morceaux les plus marquants, dont les deux long et très sonicyouthesques (oui c’est un genre à part entière) Speak to the Wild et Forevermore. Le reste du set est bien efficace, des envolées lyriques à la guitare et des morceaux parfaits pour cette heure du festival.
Evidemment il y a une petite séance de bruit pour réveiller tout le monde après les pluies de l’après-midi. Sinon ça ne serait plus Thurston.
Pour continuer dans la thématique guitare mais dans un genre radicalement différent avec le groupe de Ty Segall, Fuzz. Un trio sur la grande scène, grimés et plutôt agités, pour jouer leur hard rock mâtiné de garage. Le chef est au centre, à la batterie et vêtu d’une chemise rayée du meilleur aloi.
Le concert est parfait, il y a des réminiscences de Black Sabbath comme annoncé et comme prévu après l’écoute du très bon album ; des morceaux qui parlent de solitude, de souffrance et qui évoquent des rituels presque chamaniques.
Ty Segall l’artiste complet, le Justin Bieber du garage fait le show, on retrouve avec grand plaisir l’incroyable et halluciné Loose Sutures, morceau monumental du disque. Presque à bout de souffle, on est donc fin prêts pour la suite.
La suite c’est tout simplement les gars d’Algiers, qu’on avait rencontré avec plaisir en début de soirée. Ils jouent sur la scène des remparts, très belle innovation de cette année, qui fait face à la scène classique du fort. En plus cette scène respecte bien l’adn du festival puisqu’il y a une très belle flaque d’eau en plein milieu de l’espace, sans doute pour qu’on se souvienne bien où on est.
Donc Algiers ambiance la scène avec le chanteur charismatique Franklin Fisher qui attire tous les regards, son acolyte bassiste fait de son mieux pour faire aussi bien, en s’agitant et en roulant des yeux et en surjouant, mais vraiment mec tu peux pas test (alors que le gars était plutôt intéressé et articulé lors de l’interview).
A part ça le concert est juste parfait, de l’émotion, des chansons énergiques et survoltées ; on se rapproche presque des aînés (moins politiques) de TV on the Radio par moment. C’est radical et survolté, avec une singularité qui leur est propre, due sans aucun doute à la rivalité feutrée entre les deux principaux protagonistes.
Ce n’est pas parfait certes, mais il y a de la sincérité et de l’énergie, et une vrai colonne vertébrale ; on est assez loin de l’engagement politique lolcat décrit (évoqué hein) par un fanzine ; en même temps peut être que l’auteur a vu de l’engagement et du militantisme dans le cirque grotesque de Ratatat (on y revient) ou chez le revival underground Resistance (c’est pour déconner hein) de Daniel Avery (ahem).
Pendant ce set assez intense, je retrouve tout ce qui m’avait bien plu sur l’album, dont les très bonnes chansons Games ou Black Eunuch. Lorsque le concert se termine les personnes présentes semblent presque regretter de les laisser partir.
Sur la grand scène, les canadiens de Timber Timbre s’installent, comme je ne suis pas du tout convaincu (c’est le moins qu’on puisse dire). Je décide que le moment gastronomie de festival est arrivé, ce qui sera au moins un peu plus distrayant en attendant de voir Girl Band.
Le moment de Girl Band arrive assez vite (je crois), enfin pas assez à mon goût tant les moment Timber a été pénible (j’avoue que le truc le plus pénible est encore à venir dans les jours suivants, quoique). Les irlandais foufous sont sur la petite scène et ils commencent très rapidement à faire bouger les spectateurs. La pluie est oubliée, et leur garage/noise/postpunk bruyant fait secouer les têtes et les pieds de tout le monde. La scansion très particulière du chanteur réveille bien tout le monde (coucou LCD Soundsystem).
et le groupe est un des très bons moments de la soirée, malgré l’heure avancée, tout le monde trouve son seconde souffle. A la fin du concert, on a l’impression de pouvoir continuer pendant quelques heures.
Cette impression c’était avant l’arrivée du cirque Ratatat sur la scène. Ratatat c’est un duo qui existe depuis plusieurs années et qui semblent avoir dédié leur vie à toujours faire les mêmes morceaux pour faire de l’habillage d’émissions télé et de reportages.
La recette est simple, prendre des petits bouts de musique électronique inoffensifs, ajouter des riffs de guitare horribles, puis des samples sans queue ni tête, saupoudrer de filtres affreux, et on a un morceau tout prêt pour une rotation à la TV. C’est facile hein. Le concert est donc sans surprise puisqu’on entend un pot-pourri des morceaux des gars, les guitares sont super propres (à se demander si ils jouent en vrai…), tout est très millimétré, et les poses grotesques des types n’arrangent pas leur cas.
De quoi se poser pas mal de questions. Après cette purge, les jambes molles, je me dit que Rone serait au dessus de mes forces et je décide sagement d’aller dormir un peu et de me préserver pour ne pas voir Björk demain .
[…] Prev Post Deafheaven – Brought to the Water Next Post > Route du Rock 2015. Day one. Vendredi 14 août 2015 […]