Festival This is Not a Love Song, Nîmes. 29 au 31 mai 2015.

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Traversée express de Nîmes, direction une zone commerciale cerclée de larges routes, charmless archétype des périphéries urbaines. A priori, ça ne fait pas rêver, et pourtant, c’est là qu’est installée la SMAC (smack !) Paloma, une salle qui propose toute l’année une programmation pointue et qui organise depuis trois ans au mois de mai le joli festival This is Not a Love Song (aka TINALS), avec l’asso Come on People. Une fois entrés sur le site, boum, miracle, une marraine la fée bien sympa a posé sa baguette sur les lieux et elle nous fait oublier la laideur extérieure. Ils ont bossé, hein, les organisateurs et les bénévoles, pour construire un décor-cocon onirique et décalé, genre Alice au pays des petits flamants roses, des fleurs géantes et des coussins verts et violets. Ils ont joué à fond la carte de l’innocence retrouvée, à base de jolies balançoires, de couronnes de fleurs DIY (j’avoue, j’ai craqué), de chasse à l’adulte à partir de photos adolescentes. C’est joli, surtout sous le soleil, et tout a été conçu pour que les festivaliers se sentent bien ; le soin apporté à l’accueil est palpable jusque dans les détails – d’autres festivals pourraient clairement en prendre de la graine…

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Les concerts ont lieu en extérieur et en intérieur et on circule aisément entre les scènes, seule la plus petite des salles ne peut accueillir tout le monde. Premier soir, Fucked Up pour commencer, c’est un peu rude et rèche, on poursuit notre route vers Swans, groupe culte mais, là aussi, la dissonance et la multitude de couches sonores sont trop ardues pour cette heure précoce (et peut-être trop ardues tout court, mais on va me jeter des pierres en forme de corbeau). C’est finalement les Canadiens de Ought qui captent l’oreille et l’attention de la façon la plus plaisante. Les quatre gars ont l’air de sortir d’un catalogue Super U des années 90 avec leurs jeans et leurs tishirts unis bien sages. Leurs chansons sont elles aussi héritières de cette décade, mais les mélodies claquent plus que sur album, le charme lancinant et faussement négligé de la guitare et du chant de Tim Darcy fait son effet, petit à petit, à tel point qu’on oublie finalement que tout ça ressemble de près à Pavement.

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Sous un soleil qui s’éteint, Dan Deacon met le feu comme à son habitude, dehors, mais on ne participe à la transe que d’un peu loin, frustrés, parce que le choix d’un food truck de burgers n’était que peu stratégique. Une fois repus, on enchaîne avec les derniers accords de Mikal Cronin et les sérénades folks de Kevin Morby. Le chouchou a changé de chemise (finis les carreaux rouges et blancs) et ressemble désormais à un manadier tout de blanc vêtu, raccord avec le patrimoine régional donc. Mais j’avoue que je ne retrouve pas le plaisir ressenti lors de son concert au Point Ephémère il y a quelques mois, Kevin est trop distant ce soir, ce qui rend ses nasillements dylaniens moins sympathiques.

Puis, direction l’ami Gaz Coombes, mais c’est un peu amer comme sensation, retrouver cette voix chérie des beaux jours de Supergrass, posée sur des chansons si FM et sans saveur qu’il faut bien se résoudre à fuir. Dehors, la nuit est plus dense et Caribou nous fait danser sous une pluie si fine qu’elle n’est presque pas réelle. La précision de sa coupe de cheveux (derrière la tête, c’est rasé au cordeau) n’a d’égale que la précision des sons bien calibrés qu’il balance sans effort.

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Le lendemain, après une découverte des belles et vieilles pierres nîmoises, Twerps me cueille le cœur dès l’entrée sur le site. Je suis ravie ravie de voir enfin ces Australiens que j’aime depuis 2011, depuis leur flamboyant et triste single « Dreaming ». Leur set est bercé par des guitares comme on les aime, en mode Sarah Records,  avec un son qui donne instantanément le sentiment d’être à la maison (this is the indie house, we’re indie here, in the indie house). Voix masculine et voix féminine à la limite du juste, qui savent suggérer joliment des sentiments transitoires. Après un concert raté d’Ariel Pink (certains diront que c’est la faute de l’ingé son, d’autres dont je suis doutent un peu de sa capacité à enthousiasmer en live),  on plonge dans les profondeurs avec Mark Kozelek et Sun Kil Moon. Même s’il fait tout pour se rendre antipathique, en croyant être à Paris et en engueulant un peu trop ses musiciens, il n’en reste pas moins qu’il est si extraordinaire qu’on lui pardonne. Mark appuie sur les sentiments avec sa voix cassée qui n’arrête jamais de dérouler des histoires et de rompre les rythmes. C’est intense et complexe.

Et puis c’est l’heure de the Divine Comedy. Gracieux et saoul, Neil Hannon nous promène dans sa discographie en croonant avec humour ses plus belles ballades. TINALS est un festival de trentenaires (après enquête prolongée, j’ai quand même réussi à trouver des gens de moins de 20 ans), et c’est le moment où les sourires révèlent les rides au coin des yeux, omniprésentes et touchantes. On finit par les oublier en se jetant dans la folie qui entoure la scène karaoké, où des gens déguisés en lapins punks passent le micro à des quidams et quidamettes franchement doués, qui électrisen tà coup de tubes et de danses les quelques festivaliers éméchés (faut dire qu’on ne sert que des demis, ça demande donc plus d’efforts que d’habitude de se la coller). La scène a failli s’écrouler, c’est le signal du retour et la fin de TINALS pour nous. dommage, le dimanche on ne peut pas rester alors que la programmation est alléchante… Un festival à taille très humaine,  très agréable, faudra revenir !

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