« Des arbres à abattre » au Théâtre de la Colline

Adaptée du roman éponyme de Thomas Bernhard, la pièce « Des arbres à abattre » , un projet de Claude Duparfait et Célie Pauthe,  revient au Théâtre de la Colline jusqu’au 27 septembre. Pour ceux qui l’avaient manquée en 2012, c’est incontestablement l’une des pièces à voir en cette rentrée.

 

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Lors d’un “dîner artistique” donné par les époux Auersberger en l’honneur d’un vieux comédien du Burgtheater et consécutif au suicide d’une amie commune, le narrateur observe l’intelligentsia viennoise, avec qui il avait rompu depuis presque trente ans. Assis dans son fauteuil à oreilles, il rumine la haine qu’il entretient à l’égard de cette société à laquelle, cependant, il appartient.

Durant un long monologue qui constitue la première partie de la pièce, Claude Duparfait (impeccable narrateur misanthrope) déploie dans une introspection rageuse et obsessionnelle toutes ses rancœurs. L’écriture de Bernhard, pleine de boucles et de répétitions, a quelque chose d’hypnotique, sinon d’oppressant. Le spectateur, qui a peut-être craint au tout début de se lasser rapidement de ces ruminations, se voit happé.  En outre, il est piqué à vif par l’intelligence et l’humour à froid de cette charge implacable et non dénuée de paradoxes contre ce petit monde fait d’autosatisfaction, de superficialité et d’hypocrisie.

Alors que la hargne arrive à son premier paroxysme et que le spectateur n’en peut déjà plus de cette société artistique, il se retrouve plongé justement dans ce diner des Auersberger !

Le narrateur se mure alors dans son mutisme pour laisser son audience observer in situ le fonctionnement mondain du couple et de ses convives. Sans surprise, il s’agit d’un théâtre de marionnettes fait de discours fats où les prétendues finesse intellectuelle et érudition ne sont que farce et cache-misère pour des personnages sans humanité. Et, lorsque cette humanité tend à transparaître, elle semble ineptie,  violence, rupture et folie. (formidables élans du mari Auersberger incarné par un François Loriquet excellent).

Les ruptures et la manière habile de jouer avec les attentes du spectateur font de cet exercice d’adaptation d’un roman une véritable réussite théâtrale.

« Des arbres à abattre »,  pièce ravageuse, violente et complexe ravit tant par sa sagacité que par la justesse du quintet de comédiens qui la portent.

 

Des arbres à abattre

d’après le roman de Thomas Bernhard

un projet de Claude Duparfait et Célie Pauthe

avec

Claude Duparfait, Laurent Manzoni, Annie Mercier, Hélène Schwaller, Fred Ulysse

avec la participation de Anne-Laure Tondu

traduction de l’allemand Bernard Kreiss

Reprise à La Colline

Petit Théâtre

du 11 Septembre 2013
au 28 Septembre 2013

durée 2h15

du mercredi au samedi à 21h, le mardi à 19h et le dimanche à 16h

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